«Il doit être évidemment entendu que l’autorité indivisible de l’Etat est confiée toute entière au Président par le peuple qui l’a élu et qu’il n’en existe aucune autre, ni ministérielle, ni civile, ni militaire, ni judiciaire, qui ne soit conférée et maintenue par lui » Général de Gaulle, 31 janvier 1964.
Depuis quelques semaines, on est en droit de se demander qui du Président, ou de Soumah tire sur les ficelles du pouvoir? En effet, pendant que le gouvernement invite élèves et enseignants à se rendre à l’école, le Sieur Soumah maintient son mot d’ordre de grève jugé illégal aux yeux des autorités.
Dans l’émission des grandes gueules de la radio Espace du 22 février 2018, M. Aboubacar Soumah a laissé entendre que lui et son équipe sont prêts à aller jusqu’au bout pour que les conditions exigées soient satisfaites, y compris si cela implique une année blanche.
Au risque de créer un précédent et de fragiliser l’Etat et ses institutions, le gouvernement ne doit pas céder à la pression du syndicaliste Aboubacar Soumah.
Jamais, de mémoire de guinéen, un syndicaliste n’aura autant tenu tête face à l’Etat. Si la cause défendue est juste – les conditions de vie des enseignants sont loin d’être reluisantes -, la méthode utilisée frise la rébellion, l’extrémisme et l’égoïsme. D’autant que les règles minimales pour un dialogue supposent que chaque partie accepte de faire un certain nombre de concessions pour parvenir à un compromis, un terrain d’entente. Or, le Sieur Soumah et ses acolytes donnent l’impression de ne pas être ouverts à un dialogue.
Je ne cherche pas à justifier la légèreté avec laquelle le gouvernement a géré cette crise depuis le début qui, d’ailleurs, faut-il le rappeler, a conduit au limogeage de l’ancien Ministre de l’éducation nationale. Je souhaite seulement faire observer que cette démarche du Sieur Soumah, si elle aboutit, risque d’affaiblir davantage l’Etat et d’ouvrir un boulevard à toutes sortes de réclamations fantaisistes. Les autres corps de fonctionnaires ne risquent-ils pas de s’enfoncer dans la brèche que constituerait le succès de Soumah pour formuler des exigences plus déraisonnées ? Que dira-t-on lorsque les soldats prendront des armes pour exiger, à leur tour, l’amélioration de leurs conditions de vie ?
De mon point de vue, l’amélioration des conditions de vie des enseignants apparait comme une nécessité et même une obligation, si l’on souhaite, un tant soit peu, rehausser le niveau de nos élèves. Mais, faut-il pour y arriver, payer le prix d’un extrémisme inouï marqué par un rejet définitif du dialogue et par la définition unilatérale de pré-conditions ? Je ne pense pas.
Je crois et c’est un avis personnel, que si le mouvement du Sieur Soumah a connu autant de succès, c’est moins à cause du respect de son mot d’ordre de grève qu’à cause de l’incapacité du gouvernement à assurer la sécurité des citoyens. Quel parent laisserait son enfant partir à l’école, si à la veille, un autre enfant est tombé sous les balles? Ou s’il sait que la route qui conduit à l’école de son enfant est prise d’assaut impunément à 6 h du matin par des individus qui s’y donnent le droit de brûler des pneus et de caillasser les véhicules ?
S’il y a un succès qu’on peut reconnaitre au mouvement du Syndicaliste Aboubacar Soumah, c’est d’avoir su se servir des faiblesses de l’Etat et de la naïveté de certains enseignants pour faire prospérer son ambition.
Il faut envisager des solutions de décrispation de la situation actuelle pour permettre aux enfants de reprendre le chemin de l’école, mais céder à la pression de Soumah serait une solution désastreuse.
Augustin Mansaré, citoyen guinéen