À la SONAP, les directeurs généraux se succèdent, et chaque passage ressemble à une leçon magistrale de mauvaise gouvernance.
L’actuel DG, Lanciné Condé, ne fait pas exception, mais il s’illustre avec une particularité déconcertante , le transfert nocturne de 19 pick-up flambants neufs, sortis d’usine, directement… chez lui à la Camayenne.
Ces véhicules, achetés sous l’ère de l’ex-DG Amadou Doumbouya pour équiper les cadres de la SONAP, avaient été laissés en attente, garés dans la cour de la direction en rénovation.
Mais voilà que l’arrivée du “sauveur” de la SONAP, censé redorer l’image de l’entreprise après une série de scandales, prend des allures de farce tragique.
Car pourquoi, si ce n’est dans un élan de privatisation déguisée ou de détournement , un bien public destiné à améliorer le fonctionnement d’une société d’État se retrouve-t-il stationné dans une résidence privée ? Est-ce là une stratégie innovante de gestion des ressources, ou simplement l’illustration d’un mépris profond pour la chose publique ?
Ce dernier épisode montre une fois de plus que le renouvellement des têtes à la SONAP n’a pas suffi à rénover les pratiques. Un DG chasse l’autre, mais la corruption reste, elle, solidement ancrée.
Que reste-t-il à espérer ? Une enquête ? Une sanction exemplaire ? Peut-être, mais il sait déjà que détourner les biens publics n’est pas synonyme de sanctions, car il faisait partie de la délégation envoyée pour demander la clémence de Doumbouya en faveur d’un cadre ayant fui le pays après avoir détourné des fonds publics .
Il sait également que l’épée de Damoclès, annoncée par Doumbouya comme suspendue au-dessus de la tête des corrompus, n’est qu’un simple morceau de caoutchouc qui chatouille au lieu de blesser.
C’est pourquoi aucun cadre n’a peur de détourner des fonds , après tout, il suffit d’envoyer des sages plaider la clémence en votre faveur chez Doumbouya.
Pour l’heure , les 19 véhicules restent tranquillement garés au domicile privé de M. condé , tandis que les cadres de la SONAP, eux, attendent des moyens pour faire leur travail.
Mais que valent 19 pick-up dans un pays où la corruption roule à plein régime ?
Abdoul Latif Diallo
Journaliste d’investigation
Très très indépendant