Conakry – La tension monte entre les autorités guinéennes et Emirates Global Aluminium (EGA), propriétaire de la Guinea Alumina Corporation (GAC). La junte au pouvoir a ordonné la suspension des exportations de bauxite depuis un mois, après avoir déjà bloqué, il y a plusieurs mois, son transport entre la mine de Boké et le port de Kamsar. Résultat : l’activité est à l’arrêt et plus de 3 000 emplois, directs et indirects, sont aujourd’hui menacés.
À l’origine de cette décision, un différend autour des engagements contractuels de GAC. Lors du rachat de la mine, EGA s’était engagée à construire une raffinerie d’alumine en Guinée d’ici 2027. Un projet que Conakry souhaite voir avancer afin de favoriser la transformation locale du minerai. Pourtant, d’autres compagnies opérant sur le marché de la bauxite ne sont pas soumises aux mêmes exigences, malgré des volumes d’exportation bien supérieurs à ceux de GAC.
Avec une production annuelle de 14 millions de tonnes en 2023, GAC expédie sa bauxite brute vers sa raffinerie d’Al-Taweelah, aux Émirats arabes unis. Mais depuis la suspension des activités, les principaux sous-traitants, notamment GPC et DTP (filiale du groupe Bouygues), ont cessé l’extraction du minerai et placé leurs salariés en chômage technique.
Face à cette impasse, GAC envisage à son tour de réduire ses effectifs. Selon des sources concordantes, des dirigeants de Mubadala, maison mère d’EGA, se sont rendus en Guinée afin de négocier une sortie de crise. Les représentants d’Abou Dhabi auraient accepté l’ensemble des exigences formulées par Conakry. Toutefois, la finalisation de l’accord nécessite des diligences juridiques et fiscales avant sa signature définitive.
Mais en attendant, le le chef de cabinet à présidence, Djiba Diakité, refuse d’accorder une autorisation provisoire permettant la reprise temporaire des opérations. Une position qui, selon certains observateurs, pourrait être motivée par des considérations politiques. En effet, GAC aurait entretenu par le passé des liens privilégiés avec l’ancien président Alpha Condé et, contrairement à d’autres acteurs du secteur, n’aurait pas versé de contributions financières au CNRD.
Alors que l’économie locale souffre déjà des conséquences de cette paralysie, le dossier GAC pourrait devenir un test important pour la politique minière du régime en place.Si le CNRD ne peut pas créer d’autres emplois, il doit au moins préserver ceux qui existent déjà.
Abdoul Latif Diallo
Journaliste d’investigation
Très très indépendant