Un vol digne des plus grands scénarios de fiction, façon Casa de Papel, s’est déroulé sur la nationale 1 entre Conakry et Mamou, le samedi 12 avril dernier. Montant du butin , 20 milliards de francs guinéens.
Retour sur une affaire rocambolesque où amateurisme sécuritaire et imprudence se sont mêlés à une organisation criminelle visiblement bien rodée.
Une source proche du dossier nous confie que ce convoyage à haut risque était organisé par l’orpailleur Moussa Sacko, opérant depuis Siguiri, en étroite collaboration avec son partenaire Abdoulaye Maraka.
Selon nos sources, Moussa Sacko a pour habitude de transporter de l’or vers la Banque centrale de Conakry. Mais ce transfert de valeurs, qui devrait s’opérer sous haute surveillance, se fait dans des conditions d’une désinvolture étonnante, frisant l’inconscience.
Des véhicules personnels sont ainsi mobilisés pour acheminer des quantités considérables d’or.
À leur bord, deux gendarmes souvent entassés au milieu des sacs assurent une protection symbolique, armés d’une unique PMK, pour une modeste prime de 500 000 francs guinéens par mission.
Une sécurité minimale, qui laisse la porte grande ouverte à tout acte de banditisme.
Le dimanche 6 avril, Moussa Sacko organise un énième convoi en direction de Conakry. Trois véhicules prennent la route, l’un transportant deux gendarmes et une cargaison d’or.
Le voyage se déroule sans incident jusqu’à la banque centrale , où les véhicules et les colis ont été réceptionnés le lundi 7 avril .
Une fois sur place, aucun protocole standard n’est prévu pour le retour. Qu’ils doivent revenir avec de l’argent ou non, ils ne sont jamais informés à l’avance. Leur mission se limite strictement au transport de l’or vers Conakry.
Mais, à l’arrivée, les instructions changent , les convoyeurs doivent attendre, cette fois, pour assurer le retour de liquidités destinées à Sacko.
Le samedi 12 avril , les deux premiers véhicule, désormais chargé de billets neufs de 20 000 francs, prend la route de retour vers Siguiri, toujours avec les deux mêmes gendarmes à bord.
Le troisième véhicule, quant à lui, ne reçoit sa cargaison que plusieurs heures plus tard mais, fait stupéfiant, part sans aucune escorte.
C’est sur le trajet de retour que l’opération criminelle se met en branle. Près de Mamou, précisément à kolentin les deux véhicules sont interceptés par un groupe d’hommes cagoulés, certains revêtus de tenues de policiers, d’autres en civil. Postés aux abords de pick-up immatriculés “VA”, ils saluent les gendarmes, puis les laissent passer. Le piège était ailleurs.
Le troisième véhicule, isolé et sans défense, tombe entre les mains des assaillants. Le chauffeur est neutralisé, le véhicule entièrement vidé de son contenu. Depuis, aucune trace du magot.
Cette attaque relance la question, depuis longtemps soulevée, du protocole sécuritaire ou plutôt de son absence lors des convoyages d’or et d’argent à travers le pays.
“Ces transports ne devraient jamais s’effectuer sans une escorte armée composée de deux pick-up, avec six agents par véhicule, positionnés à l’avant et à l’arrière du convoi”, déplore une source proche du dossier.
Une consigne systématiquement ignorée, les orpailleurs rechignant à en assumer les coûts.
Une négligence coupable, qui vient de coûter à la filière 20 milliards de francs et prouve les failles béantes d’un système trop souvent livré à lui-même .
Abdoul Latif Diallo
Journaliste d’investigation
Très très indépendant