C’est dans un climat aussi tendu qu’une affiche du président à l’entrée du bureau qu’Aladji Cellou Camara a été officiellement intronisé, le 20 décembre 2024, à la tête de l’Office Guinéen de Publicité (OGP). Par un décret présidentiel digne des plus grandes révélations bibliques, il succède à Mandian Sidibé , l’ex-dirigeant aux mains supposément plus occupées à détourner qu’à réguler la pub publique. Aladji Cellou, tel Moïse venant libérer le peuple d’Israël, est-il l’élu pour sauver l’OGP du déluge… ou un autre pharaon déguisé en sauveur ?
Nommons-le Moïse version 2.0, mais sans la mer Rouge, juste une mer de dossiers en attente de salaires impayés. L’OGP, un département où la pub n’est plus que de la propagande, où l’affichage du visage du chef est plus courant que le café à 9 heures du matin, attendait, plus qu’un sauveur, un miracle. Il faut dire que le précédent directeur, en plus de ses talents supposés pour les détournements, avait réussi à transformer la régulation publicitaire en un grand concours de démesure , plus de portraits du chef sur les murs que de panneaux publicitaires à travers tout le pays. On n’était pas loin de la publicité pour la dictature… pardon, la “république”, bien sûr.
Ce vendredi donc, devant un parterre d’invités qui se battait presque pour être photographié à côté du DG (là, on comprend mieux pourquoi il y a tant d’affiches à l’OGP), Aladji Cellou a pris son poste. Le conseiller personnel du Président, Elhadj Thierno Mamadou Bah, lui a d’ailleurs murmuré, sans doute, des mots prophétiques : “Fais-en sorte que l’OGP soit aussi populaire que moi.” Très modeste. Et bien sûr, il ne manquait pas non plus l’inspecteur général intérimaire, Ismaël Fanta Traoré, pour superviser cette passation de pouvoir, en attendant que l’OGP ne devienne une agence de communication d’un autre genre.
Mais la grande question demeure , Aladji Cellou Camara pourra-t-il vraiment libérer l’OGP de ses chaînes ? Ces chaînes invisibles faites d’arriérés de salaire, de bureau remplis de slogans politiques et de l’omniprésence de l’effigie du Chef de l’État. À lui de démontrer qu’il n’est pas là pour remplir des murs avec des photos, mais pour remplir les caisses… et peut-être même réinventer la publicité publique en Guinée. Si Moïse a ouvert la mer, peut-être que Cellou ouvrira enfin les finances et redonnera de la dignité à un département qui n’a pas vu une campagne de pub décente depuis des lustres.
Abdoul Latif Diallo
Journaliste d’investigation
Très très indépendant
